vendredi 24 septembre 2010

Vivre exactement, c'est quoi ?

   
Je ne sais pas si Robert Musil a eu connaissance de la conception bouddhiste de la Voie du Milieu, mais il écrit ce qui suit sur ce qu'il appelle "vivre exactement":

"On nous demandera  aujourd'hui ce que cela veut dire. La réponse serait sans doute que l'on peut se représenter l'oeuvre d'une vie réduite à trois traités, mais aussi bien à trois poèmes ou à trois actions dans lesquelles le pouvoir personnel de création serait poussé à son comble. Ce qui voudrait dire à peu près:
- se taire quand on a rien à dire,
- ne faire que le strict nécessaire quand on n'a pas de  projets particuliers et, chose essentielle,
- rester indifférent quand on n'a pas le sentiment indescriptible d'être emporté, bras grands ouverts, et soulevé par une vague de la création !
On remarquera que la plus grande part de notre vie psychique serait dès lors interrompue, mais peut-être le mal ne serait-il pas si grand."(*)

(*) "L'homme sans qualités", Tome 1, traduction de Philippe Jaccottet, Editions du Seuil, 1956 &1995

Pompe & Cérémonial à Chengdu

   
Réception par Liu Qibao (Secrétaire du Comité provincial du Parti communiste chinois pour le Sichuan), le 7 août 2008, de Gloria Macapagal-Arroyo (alors Présidente des Philippines).



Réception par les dirigeants de la Province du Sichuan, le 27 mai 2009, d'un groupe d'individus suspectés d'intelligence avec la Chine (le deuxième à partir de la gauche est à surveiller en priorité).

jeudi 23 septembre 2010

Critique littéraire & philosophique

   
"Eckhart Tolle est un écrivain canadien anglais d'origine allemande (né en 1948) habitant Vancouver et qui prône la valeur spirituelle de l'attention. Il est l'auteur du Pouvoir du moment présent paru en 1999 qui est devenu un best seller international, traduit en 33 langues en particulier après qu'Oprah Winfrey en a fait la publicité dans son magazine . Il a ensuite été décliné en cartes, exercices pratiques et vidéos." (Wikipedia)

En dehors de l'exploit d'avoir mon âge et d'être toujours en vie, Monsieur Tolle fait un malheur dans l'édition: traduit en 33 langues donc, ce qui doit vraisemblablement pousser la vente à plusieurs millions d'exemplaires. Et pour raconter quoi (j'ai parcouru l'ouvrage à la Poste en attendant mon tour et j'ai vite fait le sien), je vous le demande ? 
Ce que l'on trouve gratuitement sur ce blog dans les messages publiés entre le 16 et le 19 mars 2010 ("Les 4 nobles Vérités") et le 31 mars 2010 ("La Voie du Milieu par l'Octuple Noble Sentier").  Même s'il faut y ajouter un minimum de réflexion pour en acquérir les principes, ce que j'ai voulu communiquer est accessible sans les commentaires et anecdotes personnelles de Monsieur Tolle. Le Bouddha n'a pas été plus bavard. 
J'ai encore une fois échappé au pouvoir de l'argent: mais je ne sais pas s'il faut m'en réjouir ou me plaindre....
  

mercredi 22 septembre 2010

王維 / Wang Wei (701?-761)

  

En se séparant d'un voyageur

"Je descendis de cheval ; je lui offris le vin de l’adieu,
Et je lui demandai quel était le but de son voyage.
Il me répondit : Je n’ai pas réussi dans les affaires du monde;
Je m’en retourne aux monts Nanshan pour y chercher le repos.
Vous n’aurez plus désormais à m’interroger sur de nouveaux voyages,
Car la nature est immuable, et les nuages blancs sont éternels."

"Le voyageur, dit le commentateur chinois, s’était rendu à la capitale avec l’espoir de réussir dans les concours littéraires, et de parvenir à un grade élevé. Son espoir ayant été déçu, il s’en retourne vers les montagnes, pour se livrer désormais aux seules jouissances de la contemplation. Ce qui dépend des hommes est sujet à mille changements ; mais ce qui dépend de la nature est immuable. Il est donc assuré que ce qu’il va chercher maintenant ne lui fera jamais défaut, et qu’il n’aura plus, conséquemment, de nouveaux voyages à entreprendre."

Traduction: marquis de Saint-Denys
  

Note sur l'art d'Ornette Coleman

    
Un profond dégoût l'anime, à la fois pour la musique et pour son instrument, c'est ce qui explique un ton inimitable à l'orée du symptôme dépressif. Le paroxysme est atteint dans un opus intitulé "Free Jazz", sorte de pugilat musical d'un quatuor engagé dans une crise collective d'individualisme: des lignes mélodiques à l'avenir incertain se croisent pour arriver à une harmonie consensuelle de pur hasard, au moment le moins attendu. Ou alors, c'est l'affrontement et le ton monte. Ou encore, une apparence de solo se dessine lorsque trois des compères s'abstiennent de jouer. Malgré tout, une ébauche de composition doit soutenir l'expérience, car l'auditeur patiente jusqu'au bout en croyant sa présence souhaitée. Il peut aussi tenter de trouver une piste et des gués dans cette marée sonore, pour traverser les trente-huit minutes de l'aventure dans de bonnes conditions. Mais, quoi que j'en dise, j'adore ce disque parce que l'originalité a une forme et un nom depuis qu'il a été enregistré en 1960.

lundi 20 septembre 2010

  

Deux poèmes ferroviaires

   
Cahots et hoquets, grincements de ferraille:
L'antique convoi avale l'espace et le temps
Sous une pluie hors d'âge remontant au Déluge.
Des rails noirs et luisant tracent les chemins de la mémoire.

 
Sillons de lumière tracés à la surface du ciel:
La course du train pénètre le souffle ardent
Qui vide l'écorce de toutes choses,
Pour les fondre en particules de soleil.
     

Terug naar de Noordzee

 
  

Note sur le Fandango en ré mineur du Padre Antonio Soler

      
Elle tourne, elle tourne, cette belle mécanique toujours égale mais jamais pareille. Les marionnettes fardées qu'elle entraîne dans une ronde d'une ivresse morbide, poursuivent leur perpétuelle pérégrination sur un rythme obsédant: les gammes subtiles égrènent le temps qui passe sur le carrousel infernal et sonnent le compte à rebours de leurs vies. Chaque note pincée au clavecin est une seconde détachée de l'horloge qui s'enfonce, tel un clou, dans la paume de l'auditeur expiant sous les doigts d'un démiurge musicien.

vendredi 17 septembre 2010

  

杨炯 / Yang Jiong (650-693)

 
Le vieux pêcheur
   
Le vieux pêcheur passe la nuit couché sur les rochers de la rive occidentale.
Dès que paraît l’aube, il allume des bambous et puise de l’eau pour son frugal repas.
La brume du matin se dissipe, le soleil se montre; la campagne est encore déserte;
Il est déjà dans sa barque, frappant l’eau verte de ses rames, et poussant le cri des bateliers.
D’un regard il a consulté l’horizon; il s’abandonne au courant avec insouciance,
Comme les nuages, qui courent et se poursuivent au-dessus de la montagne, s’abandonnent aux caprices du vent.

Yan Jiong fut successivement fonctionnaire et militaire, tout en demeurant poète. Exécuté lors d'une usurpation du pouvoir impérial.

Traduction: marquis de Saint-Denys

Sichuan: voyage en chambres

 

Ville-préfecture de Leshan - Emeishan Hot Spring Hotel

Les poètes

  
    
"(...) il existe d'un côté un discours capable de nommer les étants de façon univoque, et de l'autre un discours de la théologie négative nous permettant de parler de l'inconnaissable. S'ouvre alors la voie qui même tout droit à la conviction que seuls les poètes peuvent parler de l'inconnaissable, maîtres de la métaphore (qui dit toujours autre chose) et de l'oxymore (qui dit toujours la coprésence des contraires) - une idée qui séduira les poètes et les mystiques, mais aussi le scientifique positiviste, toujours prêts, en ce qui le concerne, à réfléchir rationnellement sur les limites prudentes de la connaissance durant le jour et à organiser des séances médiumniques la nuit".

"Le pouvoir de révélation reconnu aux poètes n'est pas tant l'effet d'une revalorisation de la poésie que l'effet d'une dépréciation de la philosophie. Ce n'est pas les poètes qui triomphent, ce sont les philosophes qui se rendent".

"Les poètes font de l'ambiguïté substantielle du langage la matière même de leur travail. Ils cherchent à exploiter cette ambiguïté pour en faire sortir, non un surplus d'être, mais un surplus d'interprétation".
     
___________________
  
Umberto Eco, "Kant et l'Ornithorinque",
traduction Julien Gayrard,
Editions Grasset & Fasquelle, 1999
   

jeudi 16 septembre 2010

  

OPUS MIXTUM (xv)

    
Quinzième chapitre:
  
Nombre d’entre nous songeaient à renoncer à la mission, voyant se défaire le mortier d’une culture basée sur la raison et les faits. Mais, même si le séisme m’avait un peu ébranlé, mon univers intérieur était assez vaste pour échapper aux fissures. Je recherchai du solide parmi la documentation pléthorique accumulée ces derniers temps, fruit d’incessantes révélations sur les richesses trouvées à bord.

C’est en cherchant à comprendre le fonctionnement du système thermique du vaisseau, que tout un pan de son l’architecture interne allait se dévoiler. En bref, ce qu’il faut savoir, c’est que la climatisation était assurée au moyen d’ondes sonores selon un procédé thermoacoustique décentralisé. L’origine de la source énergétique de ce système est à mettre en relation avec le moyen de propulsion lui-même, mais cet aspect d’une question d’ordre plus général est encore à l’examen.

Donc, suite aux travaux pour entamer les parois de tout un quartier, apparemment sans accès, du gigantesque navire spatial au moyen d’un excavateur à laser, puis d’un broyeur à azote liquide, des modifications de la température ambiante sont devenues perceptibles alors que certains instruments de mesure spectroscopiques étaient diversement influencés. Devant le gâchis que ces méthodes risquaient de provoquer, il fut alors décidé d’introduire une sonde à travers un trou pratiqué dans une paroi, puis de modifier, au moyen d’une pompe, la pression atmosphérique dans la cavité rencontrée en fonction des données mesurées : ce qui eut pour effet de déclencher l’ouverture de portes invisibles jusque-là.

A l’inventaire, constitué d’images en 3 dimensions de plusieurs objets mis à jour, je m’écrasai le nez sur l’écran faute de pouvoir tenir dans mes mains ces raretés que l’on ne connaissait plus que sous forme de légende : une collection de livres anciens ayant suscité convoitise et effroi à leur époque, ou au cours des siècles qui ont suivi. Même si le doute qu’il puisse s’agir d’apparitions virtuelles ou d’émanations psychiques demeurât en arrière-plan, je ne pouvais cesser de les faire pivoter sous toutes les faces, hypnotisé, exsangue.

Je ne sais s’il est indispensable d’en dresser ici  la liste, mais le besoin de partager l’émotion de la  découverte passe toute mesure. Dans une sorte de classement allant crescendo
sur l’échelle de la curiosité, voici ce que j’ai relevé parmi les ouvrages consacrés à l’alchimie, aux sciences occultes ou à la démonologie :

-       Merveilles de la Science, du Vieux Morryster
-      Saducismus Triumphatus, de Joseph Glanvill, édition de 1681
-      Daemonolatreia, de Remigius, imprimé en 1595 à Lyon
-       Hermès Trismegiste, dans l’édition de Ménard
-       Turba Philosophorum, auteur inconnu 
-       Liber Investigationis, de Gerber
-       Clef de la Sagesse, d'Artephius
-       Ars Magna & Ultima, de Raymond Lulle
-       Thesaurus Chemicus, de Roger Bacon
-       Clavis Alchimia, de Robert Fludd
-       De Lapide Philosophicode Trithermius
-       Poligraphia, de Trithermius
-       De Furtivis Literarum Notis, de Giambattista Porta
-       Traité des Chiffres, de Vigenère
-       Cryptomenysis Patefacta, de Falconer
-       Kryptographik, de Klüber
-       Le livre d’Eibon, auteur inconnu   
-       Unaussprechlichen Kulten,  de von Junzt
-       Le Livre de Dzyan, auteur inconnu   
-     Les Manuscrits Pnakotiques, auteur inconnu  

et, merveille d’entre les merveilles, le fabuleux Necronomicon de l’Arabe fou Abdul Alhazred, écrit vers 760 sous le titre original "Al Azif", puis traduit en grec vers 950 dans la version que nous connaissons par Théodore Philétas de Constantinople, et dont seuls cinq exemplaires ont échappé à la destruction voulue par le Patriarche Michel. Il n’est pas nécessaire de devoir en parcourir les pages pour que la stance mystérieuse, gravée dans la mémoire des amateurs du genre, ressurgisse dans un contexte particulièrement bien adapté à son évocation :

N’est pas mort ce qui à jamais dort

Et au long des siècles peut mourir même la mort.
   

mercredi 15 septembre 2010

 

Cette leçon vaut bien un doigt

    
Maître Chü Chih, un maître célèbre du IXe siècle, avait l'habitude de lever un doigt pour toute réponse, chaque fois qu'on lui posait une question sur le Zen. Il avait aussi un jeune disciple, un apprenti, qui suivait le maître et le servait en permanence. Ayant observé ce comportement du maître, le garçon commença lui-même à lever un doigt chaque fois qu'en l'absence du maître, on lui posait des questions sur le Zen. Au début, le maître ne s'en aperçut pas et les choses allèrent leur train. Mais le moment fatal arriva où il apprit ce que le garçon faisait derrière son dos.

Un jour, ayant dissimulé un couteau dans sa manche, il convoqua le garçon et lui dit:
- J'apprends que tu as compris l'essence du bouddhisme. Est-ce vrai ?
- C'est exact, répondit le garçon.
Le maître lui demanda alors:
- Qu'est-ce que le Bouddha ?
En guise de réponse, le garçon leva un doigt. Chü Chih l'attrapa et lui trancha le doigt. Comme l'enfant s'enfuyait en hurlant de douleur, le maître le rappela et sa question fusa tel un éclair:
- Qu'est-ce que le Bouddha ? 

...obéissant à une sorte de réflexe, le garçon voulut lever le doigt absent et...
...il atteignit sur le champ l'illumination
!

°) (°
-
 
Toshihiko Izutsu, "Le koân zen", Fayard, Paris, 1978

mardi 14 septembre 2010

  
 

Questionnez, on ne vous répondra pas

  
Un moine demanda à Tchao-Tchéou :
- Quel est le sens de la venue du premier Patriarche en Chine ?
- Le cyprès dans la cour d'entrée.

zhong centre

T’ieh Tsoui Kiao était un disciple de Tchao-Tchéou. Lorsqu'il alla voir Fa-ièn Ouen-i, un autre grand Maître du Chan (Zen), celui-ci lui demanda quel était son dernier domicile. T’ieh-Tsoui répondit qu'il venait de vivre auprès de Tchao-Tchéou. Fa-ièn lui dit alors:
- J'ai entendu dire une fois qu'un cyprès fut le sujet de son sermon, en fut-il réellement ainsi?
T'ieh-Tsoui fut catégorique :
- Il n'a jamais parlé de pareil sujet.
Fa-ièn protesta :
- Tous les moines qui sont venus ces derniers temps de l'entourage de Tchao-Tchéou relatent qu'il a parlé d'un cyprès en réponse à cette question d'un moine : "Quel est le sens de la venue du premier Patriarche en Chine ?". Comment pouvez-vous dire que Tchao-Tchéou ne fit jamais une telle allusion à un cyprès ?
Sur quoi T'ieh-tsoui se mit à rugir :
- Mon défunt Maître n’a jamais parlé ainsi. Je vous serais obligé de ne pas faire la moindre allusion à cela.

dong 西 ouest

Soueï-Lo, tout en arrangeant les glycines, demanda a son maître Ma-Tseu :
- Quel est le sens de la venue du premier Patriarche en Chine ?
Ma-Tseu répondit :
- Venez un peu plus près, et je vous le dirai.
Dès que Soueï-Lao se fut approché, le maître lui donna un coup de pied qui l'envoya à terre. Mais cette chute ouvrit soudain son esprit à un état de satori, car il se releva en riant de bon coeur, comme si un événement tout à fait inattendu et très désiré se fût produit.
Le maître demanda :
- Quel est le sens de tout ceci ?
Lao s'écria :
- Innombrables, certes, sont les vérités enseignées par les Bouddhas, et toutes, telles qu'elles sont à leurs sources mêmes, je les perçois maintenant dans l'extrémité d'un cheveu.

nan sud

Un moine vint un jour de chez Oueï-Chan auprès de Siang-Ièn, qui lui demanda :
- Il y avait une fois un moine qui interrogea Oueï-chan sur le dessein qu'avait le Patriarche en venant en Chine, et Oueï-Chan, en réponse, brandit son hossou (bâton) ; comment donc entendez-vous le sens de ce geste ?
Le moine répondit :
- L'idée du maître est d'éclairer l'esprit en éclairant la matière, de révéler la réalité par le moyen d'une réalité objective.
- Votre compréhension, dit le maître, est correcte dans ses limites; mais à quoi bon se hâter ainsi de théoriser ?
Le moine, changeant ses positions, demanda :
- Et vous, comment comprenez-vous?
Siang-Ièn brandit son hossou comme avait fait l'autre maître.

xi est

Une autre fois qu'on l'interrogeait sur le sens de la venue en Chine de Bodhidharma, Siang-Ièn mit sa main dans sa poche, l'en retira en tenant le poing fermé, et l'ouvrit comme pour en donner le contenu au questionneur. Celui-ci s'agenouilla et étendit les deux mains dans le geste de recevoir.
- Qu'est-ce que c'est ? dit le maître.
Le moine ne répondit rien.
 
bei nord

Lorsque T'eou-Tseu Ta-T'oung rencontra le maître T'soueï-Oueï dans la Salle du Dharma, il interrogea le maître sur le sens de la venue de l'Inde du Patriarche. T'soueï-Oueï resta un moment à regarder derrière lui. Comme Ta-T'oung désirait un enseignement explicite, le maître dit:
- Voulez-vous recevoir encore une pelletée de boue sur la tête ?
Cela voulait dire que le questionneur avait été déjà auparavant plongé dans la boue et qu'il n'en savait rien.

o0o
D. T. Suzuki, "Essais sur le Bouddhisme Zen",
tomes 1 à 3, Albin Michel, Paris, 1972



Explication ou confusion

"Dans le bouddhisme zen, le geste joue pratiquement le même rôle que le langage, à ceci près que le langage présente une structure infiniment plus complexe, car il implique l'élément essentiel de l'articulation, étranger à l'usage des gestes: il est articulation sémantique de la réalité. Mais, en raison précisément de cette simplicité et non-complexité, le geste est peut être plus à même que le langage de nous fournir une approche préliminaire du problème qui nous occupe".

o0o
Toshihiko Izutsu, "Le koân zen",
Fayard, Paris, 1978
 

Regard sur la Chine de 1973

 
Se savoir autre, admettre les différences, ne prétendre ni imposer sa façon d'être, ni copier celle des autres, c'est une sagesse à laquelle il est devenu audacieux d'aspirer.
A raisonner dans l'abstrait, on laisse de côté les motivations profondes qui ont assuré les réussites de la révolution chinoise. Le système maoïste excelle à puiser son énergie dans les stimulants collectifs. Vouloir appliquer à d'autres sociétés les mêmes règles - ou encore retenir ce qui est séduisant et écarter ce qui est choquant dans le modèle chinois -, c'est transplanter un arbuste sans son terreau, et même sans ses racines.
Ceux qui aspirent au modèle chinois pour être délivrés de l'injustice et de l'angoisse, doivent savoir qu'ils ne se sauveront pas en appliquant des recettes importées. Le modèle chinois ne résout pas les difficultés des Chinois à leur place. Il n'a de vertu pour eux, que parce qu'ils en font une création continue et une exigence intérieure. Comme dirait la Supérieure des Carmélites de Bernanos: "ce n'est pas la règle qui nous garde, c'est nous qui gardons la règle".
A ces réserves près, la révolution chinoise constitue l'expérience la plus extraordinaire, à coup sûr, du temps présent, - peut-être même de tous les temps -, et la plus passionnante à observer. En sciences humaines, il est à peu près impossible de se livrer à des expériences de laboratoire: le laboratoire humain qu'est la Chine offre un champ inépuisable à investigation.
Au-delà de la Révolution culturelle et des réactions stupéfaites qu'elle a suscitées, au-delà des rencontres diplomatiques spectaculaires, au-delà des affrontements pour la conquête du pouvoir, la Chine est le pays qui s'est engagé dans l'aventure révolutionnaire la plus radicale qu'aucune société humaine ait jamais connue. Des transformations qui nous paraîtraient incroyables, là-bas deviennent possibles.
"J'ai pour la Chine une grande reconnaissance, disait Pierre Teilhard de Chardin; par son immensité, par l'énormité de ses dimensions, elle a contribué à élargir ma pensée, à l'élever jusqu'à l'échelle planétaire". Peut-être aurait-il ajouté, s'il avait eu le loisir d'y retourner de nos jours: "par sa volonté passionnée de créer un univers plus juste et de changer l'homme même; par le courage avec lequel elle supporte des sacrifices qui nous sembleraient intolérables; par l'interpellation qu'elle nous adresse."
   
(Alain Peyreffite, "Quand la Chine s'éveillera", Fayard, 1973, pp. 442 & 443)

mercredi 8 septembre 2010

At friends request #3

 
crayons & estompe
  
encre sépia couvrante & encre de Chine
 
plume, encre sépia & crayons

mardi 7 septembre 2010

At friends request #2

  
gouache
  
encre de Chine
 
pastel sec

lundi 6 septembre 2010

At friends request #1

    
plume, encre de Chine & crayons
   
crayons, aquarelle & encre sépia
   
pastel sec